P.1362
Autoportrait d’Hyacinthe Rigaud peignant le portrait de François I de Castanier
Âge du modèle : 71 ans
Huile sur toile
H. 130 ; L. 140 cm
Perpignan, musée Rigaud. Inv. D 58-5-1.
Historique :
Paiement inscrit aux livres de comptes en 1730 pour 1500 livres (ms. 624, f° 44 (« M[onsieu]r de Castagney [rajout :] Castanier et M[onsieu]r Rigaud, peints dans le même tableau, pour dessus de porte composition originale ») ; Collection François I de Castanier ; par testament du 22 novembre 1757 à son neveu, Guillaume IV de Castanier (1702-1765) ; puis par testament de ce dernier à sa nièce, Catherine-Françoise Castanier (1729-1814), duchesse du Poulpry, après 1765 ; Confisqué comme bien d’immigré en 1789 dans l’hôtel de famille, rue de l’Université ; ancienne collection ; entré à Versailles sous Louis-Philippe (MV3707, inv. 5749, AC 2393) ; dépôt de l’état au musée Rigaud en 1958 ; Ancienne attribution à Pierre Lebouteux puis rendu à Rigaud par Ferry-Raynaud dans Bulletin de la société de l’histoire français, 1913, p. 34.
Bibliographie :
Roman, 1919, p. 206 ; Sarrand & Sarraute, 1955-6, p. 13-14 ; Mlle Barnaud, 1908, Bulletin de la société des archives de l’histoire français ; Constans, 1995, II, p. 755, n°4262 ; Brême, 2000, p. 54, repr. ; Lethullier, 2002, p. 117 ; Perreau, 2004, p. 146-151, repr. p. 149, fig. 116 ; cat. Exp. Rigaud intime, La Célestina, 2009, n°51, p. 124, ill. p. 133 ; Perreau, 2013, cat P.1362, p. 282 ; James-Sarazin, 2016, II, cat. P.1450, p. 507.
Expositions :
Varsovie-Cracovie-Lisbonne, 1975-1976, s.n. ; Perpignan, 2009, cat. 51.
Œuvres en rapport :
- 1. Pierre noire, estompe et rehauts de blanc sur papier bleu. H. 28,4 ; L. 45,8 cm. Cologne, Wallraf-Richardz museum. Inv. 1961/26. Hist. : Collection M. & Mme Manfred Dunkel ; Donation au musée, 1961. Bibl. : Cat. Cologne, 1961, p. 30, repr. p. 31 ; Wallraf-Richartz-Jahrbuch 24, 1962, p. 446 ; Von der Osten, 1966, p. 18, 110 (repr.), 236 ; Robels, 1967, p. 93, repr. 36 ; Cat. Cologne, 1982, p. 124, repr. p. 123 ; Brême, 2000, p. 54, repr. ; James-Sarazin, (1999) 2003, p. 308 ; Perreau, 2004, p. 146-148, repr. p. 151, fig. 117.
- 2. Huile sur toile d’après Rigaud par Louise Gaveau (active dans la 2e moitié du XIXe siècle). H. 130 ; L. 140 cm. Versailles, musée national du château. MV 5319. Commandé par le musée de Versailles en 1893. Signé : L. Gaveau/d’après H. Rigaud. Voir Constans, I, p. 359, n°2043.
- 3. Portrait d’Hyacinthe Rigaud par Pierre lebouteux. Huile sur toile. H. 129 ; L. 96 cm. Versailles, musée national du château. MV 3680. Peint en 1728 comme morceau de réception à l’Académie ; anciennes collections. Bibl. : William MacAllister Johnson, dans cat. expo. Les peintres du Roi, 2000, p. 154, repr. fig. 31b. et p. 257, n°R. 235. repr.
Descriptif :
Avec le double portrait figurant Le Brun et Mignard, cet Autoportrait au portrait de François I de Castanier fut commandé par Castanier lui-même pour faire office de dessus de porte. Ce choix iconographique n’est pas anodin car l’on sait que Rigaud, en homme d’affaire avisé, avait, tout au long de sa vie, pris des actions de la compagnie des Indes. Le fait qu’il accepte de se faire représenter aux côtés d’un simple particulier, prouve combien il tenait en estime le financier (même contre 1 500 livres !). Il s’agit ici d’un des derniers autoportraits de Rigaud, alors âgé de près de 70 ans. Rigaud ne se présente plus de face mais totalement tourné vers la gauche, la tête de trois quarts vers le spectateur. Le visage encore bien conservé, aux yeux si spirituels, n’a d’égal que la magnifique texture du vêtement moiré. L’ovale figurant François de Castanier conservé à Carcassonne semble proche de celui présent dans notre autoportrait, avec quelques variantes cependant. On pourra d’ailleurs se demander si celui-ci n’est pas en réalité une version simplifiée d’un autre portrait de Castanier, dans lequel Rigaud aurait souhaité le représenter avec plus d’ostentation ; ce que le graveur Gaillard a magnifiquement traduit dans son estampe. Dans cet autoportrait, Rigaud, tout emprunt de sa gloire, s’est représenté assis, habillé d’un lourd drapé bleu doublé de vert fané, en plein travail. Le fond de pierre à pilastres simples est sans doute une invention et ne correspond pas à la demeure privée de Rigaud, qui devait être plus humble. La complexité de la feuille conservée à Cologne, proposant une série d’idées que l’on retrouve avec variantes dans le portrait précédent, confirme l’aspect purement autographe de ce magnifique dessin. Aucune gravure n’ayant été envisagée, il pourrait néanmoins s’agir d’une série d’études réalisées a posteriori pour garder le souvenir dans l’atelier du portrait original. Peut-être même ce dessin a-t-il été tracé par Rigaud en vue d’une adaptation de l’autoportrait au double portrait précédent en un autoportrait au portrait d’Élisabeth de Gouy, gravé par Charles Daullé, en 1742, pour sa réception à l’Académie. Nous y retrouvons les deux mains, les genoux, l’épaule gauche et le drapé du manteau, l’ovale de Castanier ayant été remplacé par celui de Madame Rigaud.
À quelques détails près, on retrouve la même posture dans le portrait d'Hyacinthe Rigaud exécuté par Pierre Lebouteux (1683-1750) pour l’un de ses morceaux de réception à l’Académie le 31 décembre 1728 (Huile sur toile, H. 129 ; L. 96 cm. Versailles, musée National du château. MV 3680 ; ancienne collection Académie royale). On y remarque d'ailleurs, sur la toile posée sur le chevalet, l’esquisse du portrait de Louis de Boullongne par Rigaud. Agréé le 29 août 1722 Pierre Lebouteux (1683-1750) fut reçu à l’Académie le 31 décembre 1728 sur présentation du portrait d’Hyacinthe Rigaud et de celui de Guy-Louis Vermansal (1648-1729). Lebouteux ne faisait qu’anticiper une posture qui plaira sans doute au modèle puisqu’il la copia très consciencieusement pour ses autoportraits de la fin de sa carrière.