P.986
Âge du modèle : 67 ans
Huile sur toile
H. 71 ; L. 59.
Paris, musée du Louvre. Inv. 20341
Inscr. : « G. Édelinck Calcographus / amici effigem pingebat H. Rigaud ».
Historique :
Absent des livres de comptes ; commencé avant la mort du modèle en 1707 ; collection Hyacinthe Rigaud, 1743 ; collection Hyacinthe Collin de Vermont ; sa vente 14 novembre 1761 (n° 81 : « Une Tête d’homme de M. Rigaud de son meilleur tems » : sur l’exemplaire du catalogue de la vente Collin de Vermont conservé à la BNF (8°V 36-1400), l’effigie du graveur ami de Rigaud est décrite comme « portrait de deling » et sur l’exemplaire INHA comme « tête d’Édelinck ») ; vendu 30 livres à Claude Drevet ; coll. Claude Drevet ; sa vente, 1782, n°13 ; coll. Pietro Martini à Parme ; donné à Joly fils pour le cabinet des Estampes de la Bibliothèque Nationale le 10 septembre 1792 ; dépôt du département des Estampes de la Bibliothèque Nationale au Louvre en 1943.
Bibliographie :
Linzeler, 1929, p. 42-44 ; Gallenkamp, 1956, p. 307 ; Rosenfeld, 1981, p. 229 ; Brugerolles, 1984, n° 467 ; Coquery, 1997, p. 147 ; Brême, 2000, p. 8-9 ; James-Sarazin, 2009/1, n° 106, p. 170, 172 ; Perreau, 2013, cat. P.986, p. 207 ; James-Sarazin, 2016, II, cat. P.554, p.188-189, v. 1698 (2003/2, cat. I, n°1219).
Expositions :
Sceaux, 1993 ; Nantes-Toulouse, 1997-98, n°87, repr. p. 147 ; Perpignan, 2009, cat. 106.
Œuvres en rapport :
- 1. Pierre noire et rehauts de blanc sur papier bleu, H. 39,1 ; L. 29,5. Paris, Ecole nationale supérieure des Beaux-arts Inv. EBA 1509. Élaboré vers 1707 ; Donation Armand-Valton en 1911 (PC 37160). Voir Emmanuelle Brugerolles, Les dessins de la collection Armand-Valton, la donation d'un grand collectionneur du XIX° siècle à l'Ecole des Beaux-Arts, Paris, 1984, n°467 ; Brême, 2000, p. 9, repr. Exp. : Art français des XVIIe et XVIIIe siècles. Exposition de dessins de maîtres, livres, pièces d'archives et sculptures faisant partie des collections de l’École, Paris, École des Beaux-Arts, 1933, n°148 ; Dessins français de XVIIe siècle, Bristol, 1956 ; L’Art français au XVIIe siècle, exposition de dessins, tableaux, sculptures, gravures et documents d'archives conservés dans les collections de l'École, Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, mai-juillet 1961, n°94 ; Ile de France Brabant. Sceaux, Musée d'Ile de France ; Bruxelles, Palais des Beaux Arts, 1962, n°349 ; De Michel-Ange à Géricault, dessins de la collection Armand-Valton. Paris, Malibu, Hambourg, 1981-1982, n°158.
Descriptif :
Gérard Édelinck (1640-1707), fils d’un tailleur d’habits, fut l'un des graveurs attitrés de Rigaud et l'un de ses amis proches. Son fils, Nicolas-Étienne Edelinck (1681-1767) poursuivra cette collaboration en gravant quelques œuvres avec son père et en transposant des morceaux peints par Jean Ranc, neveu par alliance et élève du Catalan. Originaire d’Anvers, Gérard Édelinck fut élève de Cornelis Galle fils (1576-1650) puis de Gaspar Huybrechts (1619-1684), il arriva à Paris en 1665, étudia avec Nicolas Pitau l’aîné (1632-1671), puis avec François de Poilly (1623-1693), Robert Nanteuil et Philippe de Champaigne. En 1672, il s’unit à la fille de Nicolas Regnesson (1630-1670), graveur parisien et éditeur d’impression. C’est Le Brun et Colbert qui attirèrent l’attention de Louis XIV sur Édelinck qui en reçu des commissions, une pension, le titre de graveur du roi, des appartements aux Gobelins et le poste envié de professeur à l’Académie des Gobelins (dont il peindra les dispositifs dans 14 de ses gravures). En 1675, il est naturalisé et en 1677 devient académicien royal. Il est fait ensuite Chevalier de l’ordre de Saint-Michel. Il laissa une fortune considérable à sa famille et parmi ses élèves on note Gaspard, Jean et Nicolas Edelinck, Lombard et Trouvain.
Lorsqu’en 1681, Rigaud se lance à la conquête de Paris, Gérard Edelinck, son aîné de 19 ans est déjà très renommé dans la capitale. Dès 1689, le graveur interprètera son portrait de l’imprimeur Frédéric Léonard. C’est alors le début d’une longue collaboration et d’une réelle amitié dont témoigne l’inscription du tableau du Louvre. En 1698, Édelinck avait signé la superbe gravure du premier l’autoportrait de Rigaud. Bien que l’inscription du tableau du Louvre ait été ajoutée ultérieurement, elle atteste des liens qui unissaient le peintre et son modèle. Rigaud a donc choisi de représenter son ami, non pas dans le faste de son titre de premier dessinateur du cabinet du roi ou comme académicien mais dans l’intimité d’un vêtement à l’ordonnance décontractée. Il est fort probable que si le tableau avait été achevé, Rigaud aurait choisi un fond neutre (ou agrémenté par une colonne), et simplement habillé le buste d’Edelink d’un savant drapé aux mouvements amples. Il peint son ami sincèrement, avec les défauts de son visage (empâtements, rougeurs et double menton) mais ceux-ci n’arrivent pas à ôter à cette face toute sa noblesse teintée de douceur et d’esprit. Ce tableau, en dehors de l’intérêt de son modèle, est un précieux témoignage des techniques de peinture de Rigaud : il enduisait sa toile d’une préparation rouge, puis il travaillait au visage dont la finition était très poussée. Enfin, venait la perruque pour terminer sur les mains, l’habit et le décor. Avec la mort d’Édelinck en 1707, Rigaud interrompit sans doute son travail.
Á l’occasion du dessin, le peintre reprit sa composition en vue d’une transposition par la gravure dont nous ne connaissons malheureusement aucun exemplaire : un vaste drapé animé vient en effet habiller le buste d’Edelinck à l’exemple de celui qu’on retrouve dans le portrait de Fontenelle mais avec moins d’ostentation pour ce dernier. Le graveur est positionné dans l’embrasure d’une fenêtre de pierre que vient clore sur la droite un lourd manteau. Le fond qui se faisait neutre dans la toile du Louvre, offre désormais un grand mur de pierre à pilastres. Au bas de la composition générale, apparaissent les outils propres au graveur. La grande finesse de ce dessin plaide pour une paternité pleine et entière à Rigaud.