P.496
Âge du modèle : 71 ans
Huile sur toile
H. 196 ; L. 149.
Soligny-La-Trappe, Abbaye de La Trappe (bibliothèque).
Signé au dos : « Peint par Hyacinthe Rigaud 1697 ».
Au dos également, inscription latine due sans doute à Saint Simon.
Historique :
Paiement inscrit aux livres de comptes en 1697 pour 900 livres (ms. 624, f° 13 : « L’illustre abbé de l’Attrappe [la Trappe] de Rancé ») ; légué par le duc de Saint-Simon à l’abbaye.
Bibliographie :
Rigaud, 1716, p. 118 ; Hulst/2, p. 165 ; Hulst/3, p. 177-178 ; Mariette, 1740-1770, III, f° 46 r°, n° 25, VII, f° 8 ; Boislisle, 1879-1928, III (1881), p. 255-260 ; Gruyer, 1899, n° 337 ; Gruyer, 1900, n° 88, p. 207-210 ; Roman, 1919, p. 56, 60 ; Roux, VII, 1951, n° 506, p. 139 et n° 145, p. 110 ; Gallenkamp, 1956, p. 198-202 ; Weigert, IV, 1961, n° 21, p. 183 ; Colomer, 1973, p. 31-34 ; Poisson, 1975, p. 191-205 ; Constans, 1995, II, p. 768, n° 4332 ; Perreau, 2004, p. 73-75 ; Levallois-Clavel, 2005, I, p. 108, 136, 207 ; ibid. II, p. 175-176, cat. P. Dr. n° 83 ; James-Sarazin, 2009/1, p. 174, 176 ; Perreau, « L’abbé de Rancé et un Adrien Leprieur peu courant », [en ligne], 11 novembre 2010, www.hyacinthe-rigaud.over-blog.com ; Perreau, 2013, cat. P.496, p. 128-129 ; James-Sarazin, 2016, II, cat. P.521, p. 175-176 (2003/2, cat. I, n°435).
Expositions :
Paris, Bibl. nat. de Fr., 1976, n°315, cat. p. 118, repr. ; Rouen, Caen, 1979, n°473, repr.
Œuvres en rapport :
- 1. Huile sur toile d’après Rigaud, H. 123 ; L. 112. Soligny-la-Trappe, abbaye de La Trappe. Inscr. : « Armd. J. Le Bouthrer. Rance St. Savant abbé. Réformateu. Trappe. Mort 1700 »
- 2. Huile sur toile d’après Rigaud, [buste], H. 56 ; L. 46. Soligny-la-Trappe, abbaye de La Trappe.
- 3. Huile sur toile d’après Rigaud [buste], H. 40 ; L. 32. Versailles, musée national du château, MV6125.
- 4. Huile sur toile d’après Rigaud [buste], H. 80 ; L. 64. Loc. inc. (vente Paris, 31 mars 1920).
- 5. Huile sur toile d’après Rigaud. Carpentras, musée Comtadin-Duplessis. Inv. 887-2-1. Anc. Coll. Saint Simon (selon A. James-Sarazin, 2009) ; Offert par Henri, marquis de Saint-Simon (cousin du précédent) au futur Pape Clément XII (alors Laurent Corsini) qui le donna ensuite à Mgr Dom Malachie d’Inguimbert avant son départ de Rome pour Carpentras (1735) ; Carpentras, palais épiscopal ; Capentral, Hôtel-Dieu ; transfert au musée en 1887. Voir cat. Exp. Rigaud intime, ed. La Célestina, 2009, n°110, p. 174, ill. p. 176.
- 6. Huile sur toile d’après Rigaud, Châtenay-Malabry, maison de Chateaubriand.
- 7. Huile sur toile d’après Rigaud, Abbaye d’Aiguebelle.
- 8. Huile sur toile, suiveur de Rigaud (buste, XIXe s. ?), H. 55,5 ; L. 43,5. Saint-Nicolas-les-Cîteaux, abbaye. Inv. CNMHS, IM21008452.
- 9. Huile sur toile d’après Rigaud [buste]. Château de Cheverny.
- 10. Huile sur toile d’après Rigaud [buste]. Inscr. : « A.J. Le Bouthillier de Rancé. / Reformateur du Monastère de la Trappe / Né à Paris en 1626. / Mort en 1700 ». Bordeaux, Collection particulière (ancienne collection Rogier, imprimeurs à Blois).
- 11. Huile sur toile d’après Rigaud, H. 126 ; L. 105. Collection Gonzalve de Cordoue ; Saint-Germain de Clairfeuille, Château du Mesnil ; vente Orne enchères, Alençon, 11 novembre 2023*
- 12. Huile sur toile d’après Rigaud (réduit), H. 70 ; L. 53. Inscr. : « Armand Jean Bouthilier de Rancé abbé de / Trape fils de Denis Bouthilier sgr de Rancé c / d’Estat et de charlotte de Joly de Fleury ». Bussy-le-Grand, château de Bussy-Rabutin. Inv. CNMHS PM21002834.
- 13. Huile sur toile d’après Rigaud, H. 98 ; L. 77. Inscr. : « Arm. Jean de Rancé abbé ». Loc. inc. (vente Paris, hôtel Drouot, 15 novembre 1976, lot 31).
- 14. Huile sur toile d’après Rigaud, H. 81 ; L. 64,5. Incr. : « Portrait peint par Hyacinthe Rigaud / acheté à la vente de la gal. / de tableaux du Général Comte Despinoy, / inscrit au catalogue sous le n° 859 ». Collection particulière (vente Bayeux, hôtel des ventes, 11 novembre 2007, lot 35 ; vente Paris, hôtel Drouot, Tajan, 14 décembre 2009, lot 71 ; vente Paris, hôtel Drouot, Tajan, 27 octobre 2010, lot 111).
- 15. Cuivre dans un ovale d’après Rigaud. H. 21 ; L. 18. Chantilly, musée Condé. Inv. 337. Anc. Coll. Lenoir, Stafford House (n°55) ; inventaire du duc d’Aumale, peintres inconnus, n°88. Voir : Gower, 1874, pl. 114, repr. ; Gruyer, 1898, n°88, p. 207-210 ; Gruyer, 1899, n°337 ; Gruyer, 1900, n°88, p. 207-210 ; Macon, 1910, p. 245 ; Châtelet, 1970, n°141 ; Ferré, Watteau, 1972, IV, p. 1114 & 1116 ; Poisson, 1975, p. 194 (date l’œuvre de Chantilly du 19e siècle) ; Constans, 1995, n°4332.
- 16a. Gravé en buste par Nicolas Bazin en 1700 selon Hulst : « buste simple tourné à gauche et ainsi du même sens que le tableau d’où il est tiré. L’estampe grandeur de thèse moyenne. »
- 16b. Gravé par Pierre Drevet en 1702 ou 1700 selon Hulst : « petit buste tourné du sens opposé de celui qui précède [gravure de Bazin] ; petit format d’un in-4° ». H. 13,4 ; L. 8,8. Sur la face du socle : « monsieur de rancé abbé et / reformateur de la trappe / Quem mirare Senem christi patientis imago est : / Moribus et Scriptis Spirat et ore crucem / F. B. » ; sous le trait carré à gauche, « H. Rigaud pinx. » ; à droite, « P. Dr.evet Sculp. » Cette estampe figure dans le tome I de l’ouvrage de l’abbé Pierre de Maupéou paru in-octavo en 1702 : La Vie du très révérend père Dom Armand Jean le Bouthillier de Rancé, abbé réformateur de la Trappe, dédié au roy, A Paris, chez Laurent d’Houry.
- 16c. Gravé par Delpeche (cit. par Gower).
- 16d. Gravé de Étienne Jehandier Desrochers en 1766. Buste dans un ovale, tourné vers la gauche. Dans la bordure de l’ovale : « Armand Jean Boutillier de Rancé Premier Abé Reformé de la Trappe Décédé le 27. Octob. 1700 agé de 76 Ans ». Dessous : « H. Rigault pt. Gravé par E. Desrochers et se vend chez lui à Paris rue St. Jacques au mecenas ». En bas : « Tel fut ce Saint Abé qui de la Pénitence / Aux moines de son tems montra le vray sentier ; / Fils du grand Saint Bernard et son digne héritier / Il prêcha le travail, l’Oraison, le silence, / Et ne mit rien en avance / Qu’il ne pratiqua le premier ».
- 16e. Gravé par Gilbert Fillœul. H. 29,8 ; L. 21,3. Dans un ovale à droite avec, dans la bordure la lettre suivante : « ARMANDUS IOANNES BOUTILLIER DE RANCE ABBAS B. MARIÆ DE TRAPPA MONASTICÆ DISCIPLINÆ REPARATOR AC VINDEX ». Dans le socle, sous l’ovale : « Aulæ delicias, et splendida nomina Spernit, / Quœ facit ingenium : flet, Silet, orat, arat, / I.F.B. / Domino D. Claudio Devert, / Viro ad eruendam et assenrendam Simplicem ac nudam / rituum Ecclesiasticorum veritatem nato / Sancti et diserti Abbatis, dum viveret amico / Graphice expressam effigiem dicabat / Gilberto Albertus Filloeul Abbavillœus ». Sous le trait carré, à gauche et à droite : « H. Rigaud pinx. G. Filloeul sculp. »
- 16f. Gravé par Simon Thomassin.
- 16g. Gravé par Louis Desplaces.
- 16h. Gravé à mi-corps par Jean Crépy sans date : « figure jusqu’aux genoux, assise et les yeux attachés sur un crucifix ; l’air méditant et la plume à la main comme pour composer : l’estampe de la grandeur d’un in-4° » (Huslt).
- 17. Huile sur toile ovale. H. 81 ; L. 60,5 cm. Inscription apocryphe en haut de la toile : « D'ARMAND J. LE BOUTHILLIER / DE RANCE, Abbé & Réformateur / de la Trappe ». Vente Paris, hôtel Drouot, Brissoneau svv, 11 décembre 2023, lot. 135.
Copies et travaux :
- 1697 : « Deux [copies] de mons[ieu]r Labbé de la Trappe de Rancé » pour 100 livres (ms. 624, f°13).
Descriptif :
Le portrait du fameux Armand Jean Le Bouthillier de Rancé (1626-1700) fut commandé à Rigaud par le duc de Saint-Simon [*P.276] et donna lieu à un récit célèbre. La genèse du portrait de l’abbé de Rancé par Rigaud est un véritable roman et nous a été exceptionnellement rapportée par Saint-Simon qui en fut le commanditaire.
Le chroniqueur raconte ainsi dans ses Mémoires (« M. de la Trappe peint de mémoire ») l’anecdote qui nous donne une idée de l’immense réputation dont jouissait Rigaud, parvenu à l’apogée de son talent. Si l’on en croit Saint Simon, le commenditaire souhaitait, dès le printemps 1696, obtenir un portrait de l’abbé qui vivait reclu depuis 1657 dans son abbaye. Après une vie sprirituelle parisienne où il s’était illustré (chanoine de Notre-Dame de Paris et abbé de La Trappe, reçu maître ès arts de l’Université de Paris en 1643, ordonné prêtre en 1651, licencié de théologie l’année suivante, docteur en Sorbonne en 1654, archidiacre de Tours puis aumônier de Gaston d’Orléans en 1656), l’abbé refusait de sortir de son abbaye et renvoyait quiconque voulait l’y déranger. Il s’était ainsi toujours refusé à se faire peidre comme le confirme d’Argenville :
« Quelques personnes, et entre autres le duc de Saint-Simon, désiraient vivement avoir le portrait de M. de Rancé, depuis qu’il s’était retiré à La Trappe et y vivait dans le plus entier détachement des choses du monde. Sollicité plusieurs fois de se laisser peindre, le pieux solitaire s’y était constamment refusé […] ».
Le duc usa donc d’un habile statagème consistant à visiter le modèle en compagnie du peintre, lequel, déguisé en étranger et ingognito devait mémoriser les traits de l’abbé pour ensuite les coucher sur la toile quelques heures après. Cette mise en scène fut suffisamment originale pour que Saint-Simon la qualifie d’extraordinaire. Il précisa que Rigaud en fut très fatigué et qu’il sollicita plusieurs entretiens afin de parfaire sa captation secrète du visage. Saint Simon note d’ailleurs que l’infirmité du peintre à ne pouvoir s’exprimer correctement (il était bègue, rappelons-le), fut d’une certaine utilité : « sa difficulté de parler lui fut une excuse de n’entrer guère dans la conversation ».
À propos de la gravure, Hulst indique : « Gravé en 1700 par P. Drevet. Petit buste tourné à droite et ainsi en contre-épreuve du tableau, lequel est en pied et se voit chez M. le duc de St. Simon qui lui-même conduisit M. Rigaud à la Trappe et l’aida à peindre le pieux abbé par surprise. Il y a une copie de cette estampe dans le sens opposé, etc. ». Seules deux copies furent officiellement produites par l’atelier de l’artiste. Selon Saint-Simon « quantité » d’autres auraient été faites par le duc sans que les comptes de Rigaud n’en gardent la trace :
« Après la vanité vient le profit, qui acheva de le séduire [Rigaud], et, par la suite, il a gagné plus de 25 000 [livres] en copies, de son propre aveu, et c’est ce qui fit de la publicité. Comme je vis que c’en était fait, je lui en commendai moi-même, après lui avoir reproché son infidélité, et j’en donnai quantité. […] Je fis présent à la Trappe de la copie en grand, d’une en petit, et de deux en petit, c’est-à-dire en buste, à M. de Saint-Louis et à M. Maisne, que j’envoyai tout à la fois. M. de la Trappe avait depuis quelques années la main droite ouverte, et ne s’en pouvait servir. Dès que j’eus mon original où il est peint, la plume à la main, assis à son bureau, je fis écrire cette circonstance derrière la toile, pour qu’à l’avenir elle ne fît point erreur, et surtout la manière dont il fut peint de mémoire »
mises à jour : 22 octobre 2023*