P.1357
Âge du modèle : 58 ans
Huile sur toile
H. 166 ; L. 132
Vienne, Kunstmuseum. Inv. n°9010-1728.
Historique :
Paiement inscrit aux livres de comptes en 1729 pour 3000 livres (ms. 624, f° 43 v° : « M[onsieu]r Le Comte de Suizindorff Chancelier de L’Empereur [rajout :] en habit de cérémonie de chevalier de la Toison d’or ») ; Vienne, Theresiamungasse, coll. Baron N. de Rothschild, bis 1942 ; Don Baronne C. de Rothschild, 1947 ; restitué à la famille en 1999 ; don au musée de Bettina Looram Rotschild, 1999.
Bibliographie :
Hulst/3, p. 197 ; Mariette, 1740-1770, VII, f° 22 ; Basan, 1763, n° 55 ; Basan, 1767, I, p. 176-177 ; Roman, 1919 p. 205 ; Lossky, 1946, p. 37 ; cat. Vienne, 1965, n° 643 ; cat. exp., Paris, Petit Palais, 1992, p. 34, n° 10 ; James-Sarazin, 2003, p. 302, note 18 ; Levallois-Clavel, 2005, I, p. 91, 197, 229 ; ibid. II, p. 356-357, cat. C. Dr. n° 9 ; Perreau, 2004, p. 104, 105 ; Perreau, 2013, cat. P.1357, p. 280-281 ; James-Sarazin, 2016, II, cat. P.1438, p. 499-500.
Expositions :
Paris, Petit Palais, 1992, p. 34, n°10.
Œuvres en rapport :
- 1a. Gravé par Claude Drevet en contrepartie en 1728 ou 1730 selon Hulst. H. 50,9 ; L. 38,4. Dans l’image, en bas à gauche, sur le pot à feu, la devise : agitata clavescit [« Il met sous clef tout ce qui bouge »]. Sous le cadre, dans la marge striée par des tailles verticales, de part et d’autre des armoiries surmontées d’une couronne de marquis : « Philippus ludovicus - comes a sinzendorf//caroli VI. cÆsaris, a secretis consiliis intimÆ admissionis minister, - supremus aulÆ cancellarius, aurei velleris eques, sac. rom. //imp. thesaurarius hÆreditarius, supremus in austria - scutifer ac prÆcisor, in provincia vero supra anasum// pincerna hÆreditarius, burggravius in rheinegg, liber- baro in ernstbrunn, dominus dynastiarum gföll,//selowiz, carlswald, schritenz, freyholtzmühl, - berenau, stecken, fridenau, smilau et bastinau, dum// augustÆ suessionum legatum principem in pacificationis - conventu ageret anno salut.mdccxxviii. Ætat LVII ». En bas, sous la lettre, respectivement à gauche et à droite : « Hyacintus Rigaud Eques ordinis St. Michaelis Pinxit - Claudius Drevet sculpsit Parisis ». Cinq états connus.
- 1b. Gravé par G. A. Müller en contrepartie de la gravure de Drevet. Sous le cadre, la lettre suivante : « PHILIPPVS LVDOVICVS Sac[ri]. Rom[ani]. Imperii Haereditarius Thesaurarius Comes a SINZENDORF Liber Baro in Ernstbrun, Dominus in Geföll, Superiori Selovitz & Carlswald, Schritenz, Freyholtzmühl Berenau, Fridenau, Smilau & Bastinau, Burgravius in Rheinek, Supremus Haereditarius Scutifer, ac Praecisor in Superiori & inferiori Austria, Haereditarius Pincerna in Austria ad Anasum, Aurei Velleris Eques, Sacratissimae Caes[areae] Regiaeque Catholicae Majestatis Camerarins, Consiliarius actualis intimus ac Conferentiaeis & Supremus Aulae Cancellarius &c. &c ». En bas, de part et d’autre de l’estampe : « H. Rigaud pinxit Par(isiis) - G. A. Müller S(acrae). C(aesareae) et C(atholieae) M(aiestatis) Chalcograph(us) fe(cit) Viennae ».
- 2a. Pierre noire, craie blanche sur papier bleuté par Johann Georg Wille d’après Rigaud, 1739. H. 33,2 ; L. 51,7. Sign. : « Par J.G.W. d’après M. Rigaud 1739 ». Paris, musée du Petit Palais. Inv. D. Dut. 1096 [« […] quatre études de mains, dessinées avec beaucoup de précision, par le même [Rigaud], dont celles du portrait de M. de Sinzendorf » (François Basan, Catalogue de desseins et estampes des plus grands maîtres des trois écoles dont la vente se fera le lundi 7 février 1763 […], Paris, chez de Lormel, n° 55).] ;
- 2b. Pierre noire et craie blanche sur papier bleu par Johann Georg Wille d’après Rigaud, 1739, H. 30,7 ; L. 26,7. Sign. : « J.G.W./1739 ». Collection particulière (Paris, gal. Patrick Perrin, 1991, n° 21).
Descriptif :
« Le comte de Sinzendorff acquit le plus de crédit sur l’esprit de son maître [l’empereur Charles VI]. Il travaillait peu, il aimait bonne chère : c’était l’Apicius de la cour impériale ; et l’Empereur disait que les bons ragoûts de son ministre lui faisaient de mauvaises affaires. Ce ministre était haut et fier ; il se croyait un Agrippa, un Mécène. Les princes de l’Empire étaient indignés de la dureté de son gouvernement ; en cela bien différent du prince Eugène, qui, n’employant que la douceur, avait su mener plus sûrement le corps germanique à ses fins. Lorsque le comté de Sinzendorff fut employé au congrès de Cambrai, il crut avoir pénétré le caractère du cardinal de Fleury : le Français, plus habile que l’Allemand, le joua sous la jambe, et Sinzendorff retourna à Vienne, persuadé qu’il gouvernerait la cour de Versailles comme celle de l’Empereur »[1]. Ainsi Frédéric II considérait-il Philipp-Ludwig Wenzel, comte Sinzendorf-Neuburg (Graf, 26 décembre 1671 – Vienne, 8 février 1742), allié précieux pour l’application de la Pragmatique Sanction.
Membre du conseil aulique de Joseph I dès 1695, ambassadeur d’Autriche en France après le traité de Ryswick, Wenzel fut nommé conseiller privé en 1705. Protecteur de l’académie des arts du roi à cette même époque et grand admirateur de la France, où il réalise plusieurs ambassades dès 1700 (et à l’occasion desquelles Rigaud peint un premier buste en 1701 [P.701]), Sinzendorf se fit élever, à partir de 1723, le fameux château Trpisty (Schloss Trpist), situé en actuelle Tchéquie, sur des plans supposés de Robert de Cotte. Il en profita également pour solliciter Nicolas de Largillierre pour un portrait (Darmstadt, Kunsthalle).
Sa nouvelle effigie élaborée par Rigaud, incroyablement virtuose, fut exécutée durant le séjour du comte au congrès fraternel de Soissons en 1728. Cette année là, le peintre fit d’ailleurs réaliser par son atelier, et pour son modèle, une copie du portrait du cardinal de Fleury valant 300 livres.
Il n’est pas étonnant de conserver deux dessins d'après les mains du modèle exécutés par le graveur Joahnn Georg Wille qui, on le sait, admirait Rigaud, lequel lui rendait bien son amitié. Le portrait de Sinzendorf ayant été livré (ou emporté) à Vienne par son modèle, il est probable que Wille ait travaillé, en 1739, sur une copie à l’huile réalisée par le maître pour garder le souvenir de son œuvre ou sur des dessins originaux comme l'évoquait un catalogue de vente avec « quatre études de mains, dessinées avec beaucoup de précision, par le même [Rigaud], dont celles du portrait de M. de Sinzendorf » (Basan, n°55). La vente de la collection Dezallier d’Argenville en 1779 mentionne également, au numéro 411, « trois études de portraits, & une de deux mains ; plus deux draperies ».
Dans son catalogue de l’exposition de 1992 au Petit Palais, J. L. de Los Llanos estimait que Wille avait réalisé son dessin « d’après une étude spécifique pour le portrait de Sinzendorf, d’après une étude de mains dont il pouvait ignorer qu’elles avaient servi pour ce tableau, d’après une copie du tableau lui-même, ou encore d’après la gravure ou des études réalisées pour la gravure qu’en a faite Claude Drevet dès 1730. On le voit, les hypothèses sont nombreuses ; même si la première nous semble la plus logique […] ».
Rigaud se souviendra de l'agencement du manteau de Sinzendorf lorsqu'il s'agira de mettre en scène le même accessoire dans le portrait en pied du prince de Lichtenstein vêtu du lourd manteau de l’ordre de la toison d’or.
[1] Frédéric II de Prusse, Histoire de mon temps, Berlin, chez Rodolphe Decker, I, 1846.